Qu’est-ce qui peut pousser l’un des deux principaux partis politiques américains à se transformer en un culte de la personnalité où l’obséquiosité prime sur le mérite ? Un examen du parti communiste chinois pendant la révolution culturelle de Mao Zedong suggère des parallèles frappants.
Comment l’ancien président américain Donald Trump peut-il encore bénéficier de l’allégeance totale du parti républicain ? Tout le monde connaît aujourd’hui ses lacunes politiques et sa personnalité vindicative et mesquine. Même la fille et le gendre de Trump auraient pris leurs distances avec lui.
Et pourtant, tout ce que dit Trump reste parole d’évangile pour l’écrasante majorité des responsables et commentateurs républicains. Et pour avoir reconnu la légitimité de l’élection du président Joe Biden, la représentante du Wyoming, Liz Cheney, s’est vue retirer son poste de leader du « Grand Old Party » à la Chambre des représentants.
Le plus loin qu’un républicain puisse aller dans la contestation de son cher leader consiste en l’observation de l’ancien vice-président Mike Pence selon laquelle lui et Trump « ne seront jamais d’accord » sur les événements du 6 janvier 2021, jour où Trump a provoqué une violente insurrection au Capitole. Certains des partisans crédules de Trump qui ont pris d’assaut le bâtiment, cherchant à bloquer la certification de la victoire de Biden, auraient d’ailleurs volontiers exécuté Pence par pendaison…
Révolution culturelle
Il existe une analogie historique troublante avec la transformation du parti républicain en un culte de la personnalité : le parti communiste chinois sous Mao Zedong. Lors de la réunion plénière du parti à Lu Mountain en 1958, le maréchal Peng Dehuai a souligné que le jugement de Mao était défectueux et qu’on ne pouvait plus lui faire confiance en tant que primus inter pares. La seule question était de savoir si les autres grands du parti pouvaient aller de l’avant sans le lien charismatique de Mao avec la base crédule du parti.
Mais Mao a frappé le premier. Alors que des responsables du parti comme Peng Zhen, Luo Ruiqing, Lu Dingyi, Yang Shangkun et Deng Xiaoping ont été purgés, PengDehuai et Liu Shaoqi sont morts, et les autres grands du parti ont suivi le programme.
Ce programme était le chaos total de la Révolution culturelle. Reconnaissant que ceux qui avaient bénéficié des premières purges auraient besoin d’être maintenus dans l’insécurité et « sans dents », Mao a continué à sa sinistre besogne. Chen Boda a été purgé, Lin Biao a été éliminé, et Deng – avec sa réputation de compétence bureaucratique – a été ramené au bercail, pour être purgé à nouveau après avoir été menacé par la promotion de Wang Hongwen (soutenu par le reste de la « Bande des Quatre » et Kang Sheng), puis de Hua Guofeng.
Dans tout ce remaniement, seules deux qualifications du personnel comptaient : l’obséquiosité et l’impuissance. Si le fonctionnaire en question remplissait les deux, il était loué, honoré et promu. S’il ne remplissait pas l’une ou l’autre de ces conditions, il était relégué au second plan, envoyé travailler comme tuyauteur ou assassiné (la seule exception était Zhou Enlai, dont la flagornerie sans faille compensait peut-être le fait qu’il n’était pas totalement impuissant).
Ce processus a pu être maintenu parce qu’il y avait toujours un grand nombre de fonctionnaires du parti qui voyaient dans le chaos une opportunité pour leur propre avancement. Mais si le fait d’obéir avec déférence aux ordres de Mao pouvait apporter des avantages en termes de carrière, il était vieux, sans énergie et sur le point de rencontrer Karl Marx dans l’au-delà. Ainsi, l’intrigue de la cour s’est poursuivie, les fonctionnaires se bousculant pour « travailler pour le Président », même si personne, à part le neveu de Mao et son plus proche assistant, ne pouvait prétendre comprendre ses grognements et ses gribouillages incohérents.
Même après la mort de Mao, diverses factions ont rivalisé pour montrer qu’elles avaient été plus fidèles à ses souhaits que quiconque. Le successeur immédiat de Mao à la présidence du parti, Hua, a continué à citer Mao – « Si tu es aux commandes, je suis tranquille » – tout en vantant les succès de la Révolution culturelle. Wang et les autres membres de la Bande des Quatre se sont vantés d’être les véritables héritiers idéologiques de Mao. Même Deng soutenait tranquillement qu’il était resté dans les faveurs de Mao après sa deuxième purge, et que c’était Mao, via Wang Dongxing, plutôt que les alliés militaires de Deng, qui l’avait protégé de la Bande des Quatre.
Chairman Trump
Les comparaisons avec le parti républicain sous Trump devraient maintenant être évidentes. Les républicains les plus flagorneurs et impuissants sont dûment sélectionnés par Trump pour être promus, tandis que ceux qui ont un minimum de pouvoir ou de respect de soi ont les jambes coupées. Trump sait que cette dernière cohorte cherchera à le mettre sur la touche dès qu’elle aura acquis du pouvoir ou tissé ses propres liens avec la base. Les purges sont effectuées depuis Mar-a-Lago, où Trump dénonce ses anciens collaborateurs et assistants comme des perdants et des « Republicans in name only » (n’ont de Républicain que le nom).
Ainsi, Nikki Haley, l’ancienne ambassadrice de Trump aux Nations unies, se serait vu refuser une audience. Tout le monde sait Trump « déçu » par Pence et qu’il considère le chef de la minorité du Sénat, Mitch McConnell, comme « un stupide fils de pute ». Selon Trump, les démocrates ont l’avantage, car « ils n’ont pas tous les Romney, les Little Ben Sass et les Cheney du monde. Malheureusement, nous en avons. Parfois, il y a des conséquences à être inefficace et faible ».
Allégeance par intérêt
Et pourtant, l’écrasante majorité des républicains s’accrochent à Trump, espérant que l’apaiser leur profitera personnellement. Lors de la tentative de putsch du 6 janvier, le chef de la minorité de la Chambre des représentants, Kevin McCarthy, aurait demandé à Trump : « À qui croyez-vous parler, bordel ? » Mais peu après, McCarthy a voté pour annuler l’élection de Biden, puis a rampé à quatre pattes jusqu’à Mar-a-Lago pour promettre fidélité à Trump.
Pourquoi ne le ferait-il pas ? Trump est dangereux à contrarier, il a un lien charismatique avec une base crédule, et ne sera plus une force politique pour longtemps. Il est vieux, a peu d’énergie et est sur le point de rencontrer Roy Cohn dans l’au-delà. Et même après son départ, les différentes factions républicaines continueront à se battre pour montrer qu’elles sont plus fidèles à ses souhaits. C’est comme ça que les parallèles fonctionnent.
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Comment l’ancien président américain Donald Trump peut-il encore bénéficier de l’allégeance totale du parti républicain ? Tout le monde connaît aujourd’hui ses lacunes politiques et sa personnalité vindicative et mesquine. Même la fille et le gendre de Trump auraient pris leurs distances avec lui.
Et pourtant, tout ce que dit Trump reste parole d’évangile pour l’écrasante majorité des responsables et commentateurs républicains. Et pour avoir reconnu la légitimité de l’élection du président Joe Biden, la représentante du Wyoming, Liz Cheney, s’est vue retirer son poste de leader du « Grand Old Party » à la Chambre des représentants.
Le plus loin qu’un républicain puisse aller dans la contestation de son cher leader consiste en l’observation de l’ancien vice-président Mike Pence selon laquelle lui et Trump « ne seront jamais d’accord » sur les événements du 6 janvier 2021, jour où Trump a provoqué une violente insurrection au Capitole. Certains des partisans crédules de Trump qui ont pris d’assaut le bâtiment, cherchant à bloquer la certification de la victoire de Biden, auraient d’ailleurs volontiers exécuté Pence par pendaison…
Révolution culturelle
Il existe une analogie historique troublante avec la transformation du parti républicain en un culte de la personnalité : le parti communiste chinois sous Mao Zedong. Lors de la réunion plénière du parti à Lu Mountain en 1958, le maréchal Peng Dehuai a souligné que le jugement de Mao était défectueux et qu’on ne pouvait plus lui faire confiance en tant que primus inter pares. La seule question était de savoir si les autres grands du parti pouvaient aller de l’avant sans le lien charismatique de Mao avec la base crédule du parti.
Mais Mao a frappé le premier. Alors que des responsables du parti comme Peng Zhen, Luo Ruiqing, Lu Dingyi, Yang Shangkun et Deng Xiaoping ont été purgés, PengDehuai et Liu Shaoqi sont morts, et les autres grands du parti ont suivi le programme.
Ce programme était le chaos total de la Révolution culturelle. Reconnaissant que ceux qui avaient bénéficié des premières purges auraient besoin d’être maintenus dans l’insécurité et « sans dents », Mao a continué à sa sinistre besogne. Chen Boda a été purgé, Lin Biao a été éliminé, et Deng – avec sa réputation de compétence bureaucratique – a été ramené au bercail, pour être purgé à nouveau après avoir été menacé par la promotion de Wang Hongwen (soutenu par le reste de la « Bande des Quatre » et Kang Sheng), puis de Hua Guofeng.
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Dans tout ce remaniement, seules deux qualifications du personnel comptaient : l’obséquiosité et l’impuissance. Si le fonctionnaire en question remplissait les deux, il était loué, honoré et promu. S’il ne remplissait pas l’une ou l’autre de ces conditions, il était relégué au second plan, envoyé travailler comme tuyauteur ou assassiné (la seule exception était Zhou Enlai, dont la flagornerie sans faille compensait peut-être le fait qu’il n’était pas totalement impuissant).
Ce processus a pu être maintenu parce qu’il y avait toujours un grand nombre de fonctionnaires du parti qui voyaient dans le chaos une opportunité pour leur propre avancement. Mais si le fait d’obéir avec déférence aux ordres de Mao pouvait apporter des avantages en termes de carrière, il était vieux, sans énergie et sur le point de rencontrer Karl Marx dans l’au-delà. Ainsi, l’intrigue de la cour s’est poursuivie, les fonctionnaires se bousculant pour « travailler pour le Président », même si personne, à part le neveu de Mao et son plus proche assistant, ne pouvait prétendre comprendre ses grognements et ses gribouillages incohérents.
Même après la mort de Mao, diverses factions ont rivalisé pour montrer qu’elles avaient été plus fidèles à ses souhaits que quiconque. Le successeur immédiat de Mao à la présidence du parti, Hua, a continué à citer Mao – « Si tu es aux commandes, je suis tranquille » – tout en vantant les succès de la Révolution culturelle. Wang et les autres membres de la Bande des Quatre se sont vantés d’être les véritables héritiers idéologiques de Mao. Même Deng soutenait tranquillement qu’il était resté dans les faveurs de Mao après sa deuxième purge, et que c’était Mao, via Wang Dongxing, plutôt que les alliés militaires de Deng, qui l’avait protégé de la Bande des Quatre.
Chairman Trump
Les comparaisons avec le parti républicain sous Trump devraient maintenant être évidentes. Les républicains les plus flagorneurs et impuissants sont dûment sélectionnés par Trump pour être promus, tandis que ceux qui ont un minimum de pouvoir ou de respect de soi ont les jambes coupées. Trump sait que cette dernière cohorte cherchera à le mettre sur la touche dès qu’elle aura acquis du pouvoir ou tissé ses propres liens avec la base. Les purges sont effectuées depuis Mar-a-Lago, où Trump dénonce ses anciens collaborateurs et assistants comme des perdants et des « Republicans in name only » (n’ont de Républicain que le nom).
Ainsi, Nikki Haley, l’ancienne ambassadrice de Trump aux Nations unies, se serait vu refuser une audience. Tout le monde sait Trump « déçu » par Pence et qu’il considère le chef de la minorité du Sénat, Mitch McConnell, comme « un stupide fils de pute ». Selon Trump, les démocrates ont l’avantage, car « ils n’ont pas tous les Romney, les Little Ben Sass et les Cheney du monde. Malheureusement, nous en avons. Parfois, il y a des conséquences à être inefficace et faible ».
Allégeance par intérêt
Et pourtant, l’écrasante majorité des républicains s’accrochent à Trump, espérant que l’apaiser leur profitera personnellement. Lors de la tentative de putsch du 6 janvier, le chef de la minorité de la Chambre des représentants, Kevin McCarthy, aurait demandé à Trump : « À qui croyez-vous parler, bordel ? » Mais peu après, McCarthy a voté pour annuler l’élection de Biden, puis a rampé à quatre pattes jusqu’à Mar-a-Lago pour promettre fidélité à Trump.
Pourquoi ne le ferait-il pas ? Trump est dangereux à contrarier, il a un lien charismatique avec une base crédule, et ne sera plus une force politique pour longtemps. Il est vieux, a peu d’énergie et est sur le point de rencontrer Roy Cohn dans l’au-delà. Et même après son départ, les différentes factions républicaines continueront à se battre pour montrer qu’elles sont plus fidèles à ses souhaits. C’est comme ça que les parallèles fonctionnent.