Alors que l’élection de Joe Biden semble avoir relancé le combat mondial contre le réchauffement climatique, les gouvernements semblent ignorer volontairement le problème de l’exploitation bovine. Malgré son poids dans les émissions de gaz à effet de serre, cette industrie continue de bénéficier d’un soutien médiatique et financier important.
Si le son du bœuf grésillant sur la poêle vous fait monter les larmes aux yeux, vous êtes un vrai bœufarien. Telle est la phrase d’accroche d'un spot produit par un collectif intitulé "Proud of European Beef". Encore une bêtise publicitaire ? Pas vraiment, car l'Union Européenne en supporte 80 % du coût.
Le rapport de 2013 de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture intitulé "Tackling Climate Change Through Livestock" indique que le bœuf contribue à 41 % des émissions de gaz à effet de serre de l'ensemble du secteur de l'élevage. D'après ce rapport il présente également l'intensité d'émissions la plus élevée (c'est-à-dire les émissions les plus élevées par unité de protéine) de tous les produits animaliers. Cela s'explique en grande partie par le fait que les ruminants éructent et rejettent du méthane, un gaz à effet de serre extrêmement puissant. Par conséquent, l'élevage de bovins contribue en moyenne six fois plus au réchauffement de la planète que les animaux non ruminants (comme le porc par exemple).
Preuves accablantes contre l’élevage bovin
Depuis ce rapport, les arguments contre le bœuf se sont renforcés. En 2015, un rapport du Royal Institute of International Affairs de Londres a souligné qu'à l'échelle mondiale, la consommation de viande et de produits laitiers augmente à un tel rythme qu’elle représenterait 87 % de la quantité totale d'émissions prévue par l'accord de Paris sur le climat en 2050. Une autre étude publiée dans Science en 2018 indique qu’à quantité équivalente de protéines produites, la culture de graines de soja dédiée au tofu ne représente que 4 % des émissions nécessaires pour l’élevage bovin, contre 1% pour la production des pois et noix.
Pour atteindre l'objectif des 2°C fixé par les accords de Paris, l'UE vise la neutralité carbone d'ici 2050. Il existe désormais un solide corpus de preuves indiquant que cet objectif ne peut être atteint sans un abandon mondial de la viande. Pourtant, la Commission européenne a dépensé 252 millions d'euros pour promouvoir la viande et les produits laitiers entre 2016 et 2020, contre 146 millions d'euros pour la publicité en faveur des fruits et légumes.
"Si vous soutenez l'agriculture durable en choisissant du bœuf européen, vous êtes de vrais bœufariens", déclare la publicité de Proud of European Beef - mais sans offrir aucune explication sur les raisons pour lesquelles le bœuf européen est durable. L'annonce du financement de ces publicités, provenant en grande majorité de l'UE, indique : "L'objectif de cette campagne est d'inciter les consommateurs à ne pas avoir d'idée stéréotypée sur la viande rouge et de rétablir la confiance en leurs choix de consommation." Or, ici, le stéréotype combattu est un fait, et la publicité incite les consommateurs à faire confiance à un mode de consommation qui devrait plutôt leur donner de sérieux doutes.
Repenser l’information sur les régimes alimentaires
La promotion de l’industrie bovine par l'UE ne compromet pas seulement ses objectifs climatiques mais également ses objectifs de santé publique. Son plan de lutte contre le cancer reconnaît de son côté que les viandes rouges et transformées sont liées à des risques plus élevés de cancer. Ce point de vue est partagé par l'Organisation mondiale de la santé, qui classe les viandes transformées et traitées au sel, dans le groupe 1 des agents cancérigènes, c'est-à-dire des produits dont on sait qu'ils causent le cancer, et les viandes rouges - bœuf, agneau et porc - dans le groupe 2A des agents cancérigènes, ce qui indique qu'elles sont probablement la cause de cancer. En 2019, la Commission EAT-Lancet sur l'alimentation, la planète et la santé, un organe d'experts mis en place par l'une des plus grandes revues médicales du monde, a recommandé un régime alimentaire "largement constitué de légumes, de fruits, de céréales complètes, de légumineuses, de noix et d'huiles non saturées" avec quelques fruits de mer et de la volaille, mais "pas ou une faible quantité" de viande rouge ou transformée.
Ce mois-ci, la Commission européenne a déclaré qu'elle "réexaminera et, le cas échéant, proposera de réviser tous les instruments politiques pertinents afin de réaliser les réductions d'émissions supplémentaires." Un groupe réunissant plus de 60 scientifiques, dont Jane Goodall et Bill McKibben, demande à la Commission d'aligner sa promotion sur les produits agricoles à ses objectifs en matière de climat et de santé publique. On peut soutenir que la publicité pour le bœuf devrait suivre le même chemin que celle sur le tabac. Avant d'en arriver là, le moins que les gouvernements puissent faire est d'éviter de la financer.
Les gouvernements doivent se mobiliser
L'Union européenne n'est pas la seule à soutenir l'industrie de la viande. Les Américains consomment quatre fois plus de viande bovine que la moyenne mondiale, et sa production est responsable à elle seule de plus de 3 % des émissions de gaz à effet de serre du pays. Les producteurs américains de bœuf, de lait et de porc sont largement subventionnés, directement ou par des aides qui rendent les aliments pour animaux extrêmement bon marché.
Candidat à la présidence des États-Unis, Joe Biden a déclaré que le changement climatique était "le problème numéro un de l'humanité" et "le problème numéro un pour moi". Devenu président, il a semblé être à la hauteur de ses promesses en imposant un moratoire sur les concessions pétrolières et gazières dans la réserve naturelle de l'Arctique, en abandonnant l'oléoduc Keystone XL et en annonçant que les États-Unis allaient rejoindre l'accord de Paris. Mais lorsqu'il s'agit de s’attaquer à l'agriculture, les plans annoncés par Mr Biden ne vont pas au-delà des incitations à séquestrer davantage de carbone dans le sol et à encourager l'utilisation d'additifs dans l'alimentation du bétail pour réduire les émissions de méthane. C’est une bonne idée, mais qui prendra probablement de nombreuses années avant d'être utilisée à une échelle qui aurait un impact significatif. Manger de la viande n'est pas seulement une préférence personnelle. La façon dont les animaux consommés sont élevés et tués en fait depuis longtemps un sujet légitime de préoccupation publique. Maintenant que nous pouvons voir que la consommation de viande rouge affecte la planète entière d'une manière qu'aucun d'entre nous ne souhaite, il est temps que les gouvernements agissent.
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Le rapport de 2013 de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture intitulé "Tackling Climate Change Through Livestock" indique que le bœuf contribue à 41 % des émissions de gaz à effet de serre de l'ensemble du secteur de l'élevage. D'après ce rapport il présente également l'intensité d'émissions la plus élevée (c'est-à-dire les émissions les plus élevées par unité de protéine) de tous les produits animaliers. Cela s'explique en grande partie par le fait que les ruminants éructent et rejettent du méthane, un gaz à effet de serre extrêmement puissant. Par conséquent, l'élevage de bovins contribue en moyenne six fois plus au réchauffement de la planète que les animaux non ruminants (comme le porc par exemple).
Preuves accablantes contre l’élevage bovin
Depuis ce rapport, les arguments contre le bœuf se sont renforcés. En 2015, un rapport du Royal Institute of International Affairs de Londres a souligné qu'à l'échelle mondiale, la consommation de viande et de produits laitiers augmente à un tel rythme qu’elle représenterait 87 % de la quantité totale d'émissions prévue par l'accord de Paris sur le climat en 2050. Une autre étude publiée dans Science en 2018 indique qu’à quantité équivalente de protéines produites, la culture de graines de soja dédiée au tofu ne représente que 4 % des émissions nécessaires pour l’élevage bovin, contre 1% pour la production des pois et noix.
Pour atteindre l'objectif des 2°C fixé par les accords de Paris, l'UE vise la neutralité carbone d'ici 2050. Il existe désormais un solide corpus de preuves indiquant que cet objectif ne peut être atteint sans un abandon mondial de la viande. Pourtant, la Commission européenne a dépensé 252 millions d'euros pour promouvoir la viande et les produits laitiers entre 2016 et 2020, contre 146 millions d'euros pour la publicité en faveur des fruits et légumes.
"Si vous soutenez l'agriculture durable en choisissant du bœuf européen, vous êtes de vrais bœufariens", déclare la publicité de Proud of European Beef - mais sans offrir aucune explication sur les raisons pour lesquelles le bœuf européen est durable. L'annonce du financement de ces publicités, provenant en grande majorité de l'UE, indique : "L'objectif de cette campagne est d'inciter les consommateurs à ne pas avoir d'idée stéréotypée sur la viande rouge et de rétablir la confiance en leurs choix de consommation." Or, ici, le stéréotype combattu est un fait, et la publicité incite les consommateurs à faire confiance à un mode de consommation qui devrait plutôt leur donner de sérieux doutes.
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Ce mois-ci, la Commission européenne a déclaré qu'elle "réexaminera et, le cas échéant, proposera de réviser tous les instruments politiques pertinents afin de réaliser les réductions d'émissions supplémentaires." Un groupe réunissant plus de 60 scientifiques, dont Jane Goodall et Bill McKibben, demande à la Commission d'aligner sa promotion sur les produits agricoles à ses objectifs en matière de climat et de santé publique. On peut soutenir que la publicité pour le bœuf devrait suivre le même chemin que celle sur le tabac. Avant d'en arriver là, le moins que les gouvernements puissent faire est d'éviter de la financer.
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L'Union européenne n'est pas la seule à soutenir l'industrie de la viande. Les Américains consomment quatre fois plus de viande bovine que la moyenne mondiale, et sa production est responsable à elle seule de plus de 3 % des émissions de gaz à effet de serre du pays. Les producteurs américains de bœuf, de lait et de porc sont largement subventionnés, directement ou par des aides qui rendent les aliments pour animaux extrêmement bon marché.
Candidat à la présidence des États-Unis, Joe Biden a déclaré que le changement climatique était "le problème numéro un de l'humanité" et "le problème numéro un pour moi". Devenu président, il a semblé être à la hauteur de ses promesses en imposant un moratoire sur les concessions pétrolières et gazières dans la réserve naturelle de l'Arctique, en abandonnant l'oléoduc Keystone XL et en annonçant que les États-Unis allaient rejoindre l'accord de Paris. Mais lorsqu'il s'agit de s’attaquer à l'agriculture, les plans annoncés par Mr Biden ne vont pas au-delà des incitations à séquestrer davantage de carbone dans le sol et à encourager l'utilisation d'additifs dans l'alimentation du bétail pour réduire les émissions de méthane. C’est une bonne idée, mais qui prendra probablement de nombreuses années avant d'être utilisée à une échelle qui aurait un impact significatif. Manger de la viande n'est pas seulement une préférence personnelle. La façon dont les animaux consommés sont élevés et tués en fait depuis longtemps un sujet légitime de préoccupation publique. Maintenant que nous pouvons voir que la consommation de viande rouge affecte la planète entière d'une manière qu'aucun d'entre nous ne souhaite, il est temps que les gouvernements agissent.