La nouvelle serait presque passée inaperçue en pleine période estivale : après une année 2020 totalement noire sous l’effet de la pandémie de Covid-19, les leaders nationaux de l’industrie et des services renouent avec des performances financières exceptionnelles. Au premier semestre, le résultat net cumulé des fleurons français dépasse de 40% son niveau de 2019 d’avant crise sanitaire.
La raison en est simple. La majorité des groupes du CAC 40 a bénéficié d’un redémarrage soutenu et rapide des économies asiatiques et américaines. Prenant la mesure du choc lié aux confinements, beaucoup ont également pris l’initiative de réduire leurs coûts et redresser leur rentabilité, voire de réduire leurs investissements. Des efforts payants, surtout lorsqu’ils ont pu s’accompagner comme chez Saint-Gobain d’une capacité à augmenter les prix.
Résultat : 22 sociétés dépassent leur chiffre d’affaires du premier semestre 2019, parfois très nettement, en particulier dans le secteur du Luxe, comme chez LVMH (+12,5%) et parfois de manière spectaculaire comme avec Hermès (+22,5%).
De quoi se réjouir en principe. Car si les grandes entreprises françaises se portent bien, on peut en espérer un effet d’entraînement sur le reste de l’économie. Une espérance d’autant plus forte que si la reprise d’activité se lit dans les résultats, elle s’accompagne aussi d’un renforcement de la trésorerie des groupes les plus puissants : Rexecode et l’association française des trésoriers d’entreprises ont ainsi constaté que jamais la proportion de trésoriers jugeant leur niveau de liquidité élevé n’avait été aussi forte qu’en juillet dernier.
Jusqu’à quel point les PME de l’hexagone vont-elles profiter de cette embellie ?
Raisonnablement, elles peuvent d’abord espérer être mieux payées. L’été 2020 avait été marqué par un pic des retards de règlement inter-entreprises, avant que ceux-ci ne refluent lentement par la suite. Altares et Pacte PME ont montré qu’en juin dernier, la situation ne s’était pas spécialement dégradée de ce point de vue sur un an, avec des efforts notables de la part de plusieurs grands groupes (MBDA, Safran, SNCF, Thales...) pour payer au plus vite leurs factures à leurs sous-traitants.
Un pas important certes. Mais les entreprises de petite et moyenne taille attendent surtout de la visibilité de la part des grands donneurs d’ordres de l’industrie en termes de commande, afin de participer aussi pleinement à la reprise. Certains groupes devraient être en mesure de les y aider. On peut ainsi imaginer que les sous-traitants de TotalEnergies bénéficient en cascade d’un marché du pétrole et du gaz en hausse. Ceux de Saint-Gobain, de l’explosion du marché des matériaux de construction à la faveur d’une frénésie de rénovation des logements déclenchée par le confinement et les soutiens publics. Veolia, enfin, devrait aussi partager avec ses fournisseurs les bénéfices associés à la flambée du prix des matières premières, qui a dopé ses propres recettes de revente des matières premières secondaires issues du recyclage des déchets.
Mais les PME françaises doivent-elles vraiment s’attendre à une répercussion de grande ampleur des profits historiques dégagés par nos grandes entreprises ?
Rien ne le garantit. Il faut d’ailleurs se méfier des faux semblants. Car derrière le succès collectif enregistré au 1er semestre 2021, on décèle aussi des signes de fragilité qui peuvent se répercuter sur les chaines de valeur dans plusieurs filières.
Premier fait : tout le monde ne profite pas au même niveau du rebond enregistré sur les six premiers mois de l’année. 15 grands groupes conservent ainsi une activité en recul sur deux ans. Plusieurs filières restent en souffrance, comme l’automobile où Renault accuse encore un repli de plus de 20% par rapport aux profits dégagés en 2019.
Autre réalité angoissante pour les PME concernées : plusieurs grands de l’industrie pâtissent aussi des tensions d’approvisionnement, avec des hausses de prix qu’elles n’ont pas été capables de répercuter. C’est le cas des équipementiers, qui peinent encore à faire repartir leurs marges.
Les mesures anti-Covid n’ont pas fait non plus que des heureux. Le gestionnaire de centres commerciaux Unibail-Rodamco-Westfield a vu ses résultats dévisser de près de 60% sur vingt-quatre mois. Quant au virus lui-même, il n’a pas fini de peser sur plusieurs activités emblématiques de l’économie française, tout spécialement le Tourisme. Ainsi la France a beau attendre cet été 35 millions de visiteurs étrangers, c’est encore bien moins qu’en 2019 (-15 millions). Le chiffre d’affaires du groupe ACCOR pour le premier semestre 2021, en recul de 53% par rapport à la même période en 2019, offre un aperçu des dégâts déjà causés sur la filière.
Les têtes de filières sont à la manœuvre pour restaurer leurs performances. Beaucoup avec une réussite déjà éclatante. A l’échelle de l’économie française, les rescapés de la crise sanitaire sont plus nombreux que ceux qui ont plongé. Les défaillances, toujours orientées à la baisse, en attestent. Le moral des patrons reste lui aussi en hausse.
Mais il faut bien comprendre que le choc subi depuis mars 2020 a une conséquence imprévue : il a creusé les écarts au sein de l’écosystème productif. Ce qui doit pousser ceux qui ont fait du surplace à accélérer leurs arbitrages et transformations, afin de retrouver la place qui était la leur dans la compétition internationale avant la pandémie. Un travail d’abord individuel à conduire au niveau de chaque entreprise. Mais pas seulement. Les filières ont également une responsabilité majeure dans les décisions qui seront prises. Je suis convaincu que leur pilotage doit continuer à se renforcer avec un impératif pour les prochaines années : aborder la reconquête économique unis, avec un seul bloc composé des grandes entreprises, des ETI et des PME.
Pour avoir un accès illimité à notre contenu, y compris des articles approfondis, des critiques de livres, des interviews exclusives, veuillez vous abonner.
Personne ne sait quelle tournure prendra la pandémie ou si les récentes augmentations de prix seront transitoires, ce qui signifie que les prévisions économiques sont devenues encore plus hasardeuses que jamais. Néanmoins, certaines tendances doivent être surveillées de plus près que d’autres, et certaines politiques doivent être modifiées quoi qu’il arrive.
Déchirés entre les craintes inflationnistes et la peur de la déflation, les banquiers centraux des principales économies avancées adoptent une approche attentiste potentiellement coûteuse. Seule une refonte progressive de leurs outils et de leurs objectifs peut les aider à jouer un rôle post-pandémique socialement utile.
Bien que les États-Unis soient depuis longtemps à la pointe de la technologie, la Chine constitue un défi de taille dans des domaines clés. Mais, en fin de compte, l’équilibre des forces sera déterminé non pas par le développement technologique, mais par la diplomatie et les choix stratégiques, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays.
Sur plus de 10 000 espèces d’oiseaux, près d’une sur sept est actuellement menacée d’extinction. Le sort des oiseaux, qu’il s’agisse d’individus sauvages ou d’animaux de compagnie, serait plus difficile à ignorer si davantage de personnes comprenaient à quel point ils sont intelligents et complexes.
Historiquement, les succès comme la Conférence de Bretton Woods de 1944 sont beaucoup plus rares que les rassemblements internationaux qui produisent soit de l’inaction, soit des récriminations. La clé est de se concentrer sur ce qui peut être mesuré, plutôt que sur les personnes à blâmer.
La position de l’Inde sur le charbon lors de la récente conférence sur le changement climatique (COP26) a suscité de vives critiques, mais les économies occidentales les plus riches n’ont pas fait grand-chose pour aider la transition écologique des pays en développement. L’Inde, concernée par les conséquences du réchauffement, fera un effort de bonne foi pour contribuer à éviter la catastrophe climatique, mais seulement dans les limites de ce qu’elle peut faire.
L’ère de la « non-paix »Migrants rassemblés à l'intérieur de la zone tampon de la frontière Turquie-Grèce, à Pazarkule, dans le district d'Edirne, le 20 février 2020.
Les récentes tragédies migratoires dans la Manche et aux frontières occidentales de la Biélorussie montrent à quel point les civils sont devenus des armes involontaires dans une nouvelle ère de conflits perpétuels. Les gouvernements se rendant coupables de mauvais comportements sous couvert d’hypocrisie et de déni plausible, une course « vers le fond » est déjà en cours.
La fin du consensus économiqueLa présidente de la Commission européenne Ursula Von Der Leyen lors de laConférence de presse sur la réponse de l'Union européenne à la crise du coronavirus, à Bruxelles, le15 avril 2020.
Alors que le choc de la pandémie de Covid-19 a initialement suscité l’unité et la convergence en Europe, la phase actuelle de la crise est beaucoup plus délicate sur le plan économique et politique. Si elle est mal gérée, elle peut rouvrir de vieilles blessures et briser la légitimité nouvellement acquise des décideurs politiques.
Connexion/Inscription
Veuillez vous connecter ou vous inscrire pour continuer. L'inscription est gratuite et ne requiert que votre adresse e-mail.
La raison en est simple. La majorité des groupes du CAC 40 a bénéficié d’un redémarrage soutenu et rapide des économies asiatiques et américaines. Prenant la mesure du choc lié aux confinements, beaucoup ont également pris l’initiative de réduire leurs coûts et redresser leur rentabilité, voire de réduire leurs investissements. Des efforts payants, surtout lorsqu’ils ont pu s’accompagner comme chez Saint-Gobain d’une capacité à augmenter les prix.
Résultat : 22 sociétés dépassent leur chiffre d’affaires du premier semestre 2019, parfois très nettement, en particulier dans le secteur du Luxe, comme chez LVMH (+12,5%) et parfois de manière spectaculaire comme avec Hermès (+22,5%).
De quoi se réjouir en principe. Car si les grandes entreprises françaises se portent bien, on peut en espérer un effet d’entraînement sur le reste de l’économie. Une espérance d’autant plus forte que si la reprise d’activité se lit dans les résultats, elle s’accompagne aussi d’un renforcement de la trésorerie des groupes les plus puissants : Rexecode et l’association française des trésoriers d’entreprises ont ainsi constaté que jamais la proportion de trésoriers jugeant leur niveau de liquidité élevé n’avait été aussi forte qu’en juillet dernier.
Jusqu’à quel point les PME de l’hexagone vont-elles profiter de cette embellie ?
Raisonnablement, elles peuvent d’abord espérer être mieux payées. L’été 2020 avait été marqué par un pic des retards de règlement inter-entreprises, avant que ceux-ci ne refluent lentement par la suite. Altares et Pacte PME ont montré qu’en juin dernier, la situation ne s’était pas spécialement dégradée de ce point de vue sur un an, avec des efforts notables de la part de plusieurs grands groupes (MBDA, Safran, SNCF, Thales...) pour payer au plus vite leurs factures à leurs sous-traitants.
Un pas important certes. Mais les entreprises de petite et moyenne taille attendent surtout de la visibilité de la part des grands donneurs d’ordres de l’industrie en termes de commande, afin de participer aussi pleinement à la reprise. Certains groupes devraient être en mesure de les y aider. On peut ainsi imaginer que les sous-traitants de TotalEnergies bénéficient en cascade d’un marché du pétrole et du gaz en hausse. Ceux de Saint-Gobain, de l’explosion du marché des matériaux de construction à la faveur d’une frénésie de rénovation des logements déclenchée par le confinement et les soutiens publics. Veolia, enfin, devrait aussi partager avec ses fournisseurs les bénéfices associés à la flambée du prix des matières premières, qui a dopé ses propres recettes de revente des matières premières secondaires issues du recyclage des déchets.
S'abonner à SAY
Abonnez-vous à notre Newsletter ! Ne loupez plus les dernières actualités économiques, environnementales, technologiques et plus encore.
Je m'abonne !S'abonner maintenant !
Mais les PME françaises doivent-elles vraiment s’attendre à une répercussion de grande ampleur des profits historiques dégagés par nos grandes entreprises ?
Rien ne le garantit. Il faut d’ailleurs se méfier des faux semblants. Car derrière le succès collectif enregistré au 1er semestre 2021, on décèle aussi des signes de fragilité qui peuvent se répercuter sur les chaines de valeur dans plusieurs filières.
Premier fait : tout le monde ne profite pas au même niveau du rebond enregistré sur les six premiers mois de l’année. 15 grands groupes conservent ainsi une activité en recul sur deux ans. Plusieurs filières restent en souffrance, comme l’automobile où Renault accuse encore un repli de plus de 20% par rapport aux profits dégagés en 2019.
Autre réalité angoissante pour les PME concernées : plusieurs grands de l’industrie pâtissent aussi des tensions d’approvisionnement, avec des hausses de prix qu’elles n’ont pas été capables de répercuter. C’est le cas des équipementiers, qui peinent encore à faire repartir leurs marges.
Les mesures anti-Covid n’ont pas fait non plus que des heureux. Le gestionnaire de centres commerciaux Unibail-Rodamco-Westfield a vu ses résultats dévisser de près de 60% sur vingt-quatre mois. Quant au virus lui-même, il n’a pas fini de peser sur plusieurs activités emblématiques de l’économie française, tout spécialement le Tourisme. Ainsi la France a beau attendre cet été 35 millions de visiteurs étrangers, c’est encore bien moins qu’en 2019 (-15 millions). Le chiffre d’affaires du groupe ACCOR pour le premier semestre 2021, en recul de 53% par rapport à la même période en 2019, offre un aperçu des dégâts déjà causés sur la filière.
Les têtes de filières sont à la manœuvre pour restaurer leurs performances. Beaucoup avec une réussite déjà éclatante. A l’échelle de l’économie française, les rescapés de la crise sanitaire sont plus nombreux que ceux qui ont plongé. Les défaillances, toujours orientées à la baisse, en attestent. Le moral des patrons reste lui aussi en hausse.
Mais il faut bien comprendre que le choc subi depuis mars 2020 a une conséquence imprévue : il a creusé les écarts au sein de l’écosystème productif. Ce qui doit pousser ceux qui ont fait du surplace à accélérer leurs arbitrages et transformations, afin de retrouver la place qui était la leur dans la compétition internationale avant la pandémie. Un travail d’abord individuel à conduire au niveau de chaque entreprise. Mais pas seulement. Les filières ont également une responsabilité majeure dans les décisions qui seront prises. Je suis convaincu que leur pilotage doit continuer à se renforcer avec un impératif pour les prochaines années : aborder la reconquête économique unis, avec un seul bloc composé des grandes entreprises, des ETI et des PME.