Le philosophe Peter Singer défend depuis longtemps de nombreuses causes humanitaires et animales. Ayant gagné il y a peu un prix d'un million de dollars qu’il compte reverser en totalité, il s’interroge ici sur son approche et la meilleure manière d’utiliser cet argent. Et il demande l'aide de ses lecteurs.
J’ai récemment eu l’honneur d’être nommé lauréat du prix Berggruen 2021 pour la philosophie et la culture. Il s’agit d’une récompense annuelle d'un million de dollars qui récompense « les réalisations majeures dans l'avancement des idées qui façonnent le monde ». Je suis, bien sûr, ravi que l’objectif que je poursuis avec mon travail soit reconnu. Je suis honoré de rejoindre cette éminente liste de lauréats, dont les plus récents sont Martha Nussbaum, Ruth Bader Ginsburg et Paul Farmer. Tout comme je suis reconnaissant envers Nicolas Berggruen pour son intérêt et son soutien - trop rares chez les investisseurs fortunés - à la philosophie et aux idées.
Une fois l'excitation de la nouvelle retombée, j'ai commencé à réfléchir à ce que j'allais faire de cet argent. Il ne m'a pas fallu longtemps pour décider d’en faire don.
Tout d'abord, ma femme et moi considérons avoir suffisamment d'argent pour vivre confortablement et faire les choses qui nous tiennent vraiment à cœur, et nous pensons que nos enfants sont dans une situation similaire. Bien sûr, le fait qu'ils vivent en Australie et que, contrairement à une grande partie du monde, ils disposent d'eau potable, d’une éducation et de soins de santé gratuits les aide.
En outre, je suis bien connu pour avoir soutenu qu’il est erroné de s’acheter des produits de luxe alors que cet argent pourrait empêcher les enfants de mourir de la malaria ou d'autres maladies qui causent chaque année la mort de millions de personnes à travers le monde. Dans ces conditions, comment pourrais-je justifier l'utilisation de l'argent du prix pour acheter des biens superflus pour moi ou ma famille ?
Soutenir les ONG et la cause animale
Il y a une dizaine d'années, j'ai fondé The Life You Can Save, une organisation caritative qui diffuse le message selon lequel il est étonnamment facile pour la plupart des gens des pays riches de faire une énorme différence pour les personnes en situation d'extrême pauvreté. Cette institution recommande actuellement 23 organisations caritatives qui ont été évaluées de manière indépendante comme mettant parfaitement à profit les fonds dont elles disposent pour sauver et améliorer la vie des personnes vivant dans des conditions très difficiles.
J'ai décidé de donner la moitié du prix à The Life You Can Save. Je le fais parce qu'au cours des trois dernières années, chaque dollar dépensé par cette organisme Save a généré l’équivalent de 17 dollars de dons pour les organisations à but non lucratif qu'il recommande. (Pour les cyniques, j'ajouterai que je n'ai jamais touché un centime de The Life You Can Save).
Mais je veux utiliser cet argent pour soutenir d’autres causes. Il y a plus de 50 ans, j'ai appris qu'un grand nombre des animaux dont je mangeais alors la chair étaient condamnés à une vie misérable, entassés dans les sombres hangars de fermes industrielles. Je suis devenu végétarien et j'ai écrit Animal Liberation, qui a contribué à son tour à l'essor du mouvement moderne de défense des animaux. L'élevage industriel reste une horreur, exploitant sans pitié des dizaines de milliards d'animaux terrestres chaque année, ainsi qu'un grand nombre de poissons. La production animale contribue aussi largement au changement climatique et accroît le risque de pandémies. Je prévois donc de donner plus d'un tiers de l'argent à des organisations luttant contre l'élevage industriel, et recommandées comme efficaces par les Animal Charity Evaluators.
Trouver les causes à financer
Il restera encore une partie du prix, et je vous invite à m'aider à décider de la répartition, sur la base de l'approche éthique qui fonde The Life You Can Save. Elle est disponible gratuitement sous forme de livre électronique et de livre audio sur le site de l'organisation, où pourrez alors me dire ce que vous en pensez.
Qu'en est-il des autres options ? Devrais-je faire des dons à des organisations qui aident à la transition vers un monde sans émissions ? J'y ai pensé, mais j'ai décidé que le nombre d'organisations travaillant sur ce sujet réduisait déjà les chances que ma contribution fasse une différence significative. Certains altruistes réfléchis nous incitent à nous concentrer sur la réduction du risque d'extinction d’espèces. Mais les incertitudes sur la manière d'atteindre cet objectif sont si grandes que je préfère faire des dons à des projets pour lesquels les chances d'accomplir quelque chose de positif sont élevées.
Je suis convaincu que faire un don pour sauver des vies, aider les aveugles ou permettre à une famille d'échapper à l'extrême pauvreté fait plus de bien qu'un don à un musée ou à un opéra. D'autres comparaisons sont plus difficiles. Comment juger de la pertinence de sauver la vie d'un million de poules entassées dans des cages grillagées plutôt que de sortir une douzaine de familles de l'extrême pauvreté ?
En fin de compte, il existe plusieurs causes qu'il serait bon de soutenir. Je ne peux rien prétendre de plus pour les miennes, si ce n'est qu'elles sont parmi les meilleures qui soient.
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Déchirés entre les craintes inflationnistes et la peur de la déflation, les banquiers centraux des principales économies avancées adoptent une approche attentiste potentiellement coûteuse. Seule une refonte progressive de leurs outils et de leurs objectifs peut les aider à jouer un rôle post-pandémique socialement utile.
Bien que les États-Unis soient depuis longtemps à la pointe de la technologie, la Chine constitue un défi de taille dans des domaines clés. Mais, en fin de compte, l’équilibre des forces sera déterminé non pas par le développement technologique, mais par la diplomatie et les choix stratégiques, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays.
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La fin du consensus économiqueLa présidente de la Commission européenne Ursula Von Der Leyen lors de laConférence de presse sur la réponse de l'Union européenne à la crise du coronavirus, à Bruxelles, le15 avril 2020.
Alors que le choc de la pandémie de Covid-19 a initialement suscité l’unité et la convergence en Europe, la phase actuelle de la crise est beaucoup plus délicate sur le plan économique et politique. Si elle est mal gérée, elle peut rouvrir de vieilles blessures et briser la légitimité nouvellement acquise des décideurs politiques.
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J’ai récemment eu l’honneur d’être nommé lauréat du prix Berggruen 2021 pour la philosophie et la culture. Il s’agit d’une récompense annuelle d'un million de dollars qui récompense « les réalisations majeures dans l'avancement des idées qui façonnent le monde ». Je suis, bien sûr, ravi que l’objectif que je poursuis avec mon travail soit reconnu. Je suis honoré de rejoindre cette éminente liste de lauréats, dont les plus récents sont Martha Nussbaum, Ruth Bader Ginsburg et Paul Farmer. Tout comme je suis reconnaissant envers Nicolas Berggruen pour son intérêt et son soutien - trop rares chez les investisseurs fortunés - à la philosophie et aux idées.
Une fois l'excitation de la nouvelle retombée, j'ai commencé à réfléchir à ce que j'allais faire de cet argent. Il ne m'a pas fallu longtemps pour décider d’en faire don.
Tout d'abord, ma femme et moi considérons avoir suffisamment d'argent pour vivre confortablement et faire les choses qui nous tiennent vraiment à cœur, et nous pensons que nos enfants sont dans une situation similaire. Bien sûr, le fait qu'ils vivent en Australie et que, contrairement à une grande partie du monde, ils disposent d'eau potable, d’une éducation et de soins de santé gratuits les aide.
En outre, je suis bien connu pour avoir soutenu qu’il est erroné de s’acheter des produits de luxe alors que cet argent pourrait empêcher les enfants de mourir de la malaria ou d'autres maladies qui causent chaque année la mort de millions de personnes à travers le monde. Dans ces conditions, comment pourrais-je justifier l'utilisation de l'argent du prix pour acheter des biens superflus pour moi ou ma famille ?
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Il y a une dizaine d'années, j'ai fondé The Life You Can Save, une organisation caritative qui diffuse le message selon lequel il est étonnamment facile pour la plupart des gens des pays riches de faire une énorme différence pour les personnes en situation d'extrême pauvreté. Cette institution recommande actuellement 23 organisations caritatives qui ont été évaluées de manière indépendante comme mettant parfaitement à profit les fonds dont elles disposent pour sauver et améliorer la vie des personnes vivant dans des conditions très difficiles.
J'ai décidé de donner la moitié du prix à The Life You Can Save. Je le fais parce qu'au cours des trois dernières années, chaque dollar dépensé par cette organisme Save a généré l’équivalent de 17 dollars de dons pour les organisations à but non lucratif qu'il recommande. (Pour les cyniques, j'ajouterai que je n'ai jamais touché un centime de The Life You Can Save).
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Qu'en est-il des autres options ? Devrais-je faire des dons à des organisations qui aident à la transition vers un monde sans émissions ? J'y ai pensé, mais j'ai décidé que le nombre d'organisations travaillant sur ce sujet réduisait déjà les chances que ma contribution fasse une différence significative. Certains altruistes réfléchis nous incitent à nous concentrer sur la réduction du risque d'extinction d’espèces. Mais les incertitudes sur la manière d'atteindre cet objectif sont si grandes que je préfère faire des dons à des projets pour lesquels les chances d'accomplir quelque chose de positif sont élevées.
Je suis convaincu que faire un don pour sauver des vies, aider les aveugles ou permettre à une famille d'échapper à l'extrême pauvreté fait plus de bien qu'un don à un musée ou à un opéra. D'autres comparaisons sont plus difficiles. Comment juger de la pertinence de sauver la vie d'un million de poules entassées dans des cages grillagées plutôt que de sortir une douzaine de familles de l'extrême pauvreté ?
En fin de compte, il existe plusieurs causes qu'il serait bon de soutenir. Je ne peux rien prétendre de plus pour les miennes, si ce n'est qu'elles sont parmi les meilleures qui soient.