Les acteurs du « private equity » travaillent habituellement sur du moyen terme, à 3 ou 4 ans. Or ce n’est pas toujours le bon calendrier pour conjuguer les aléas entrepreneuriaux et l’optimisation du développement de l’activité. (paru dans SAY 5, 3e trim. 2021)
L’industrie du « private equity » a inventé le métier d’actionnaire et d’investisseur : une capacité singulière à prendre des risques, à analyser les paramètres d’un projet économique sous différents aspects, en laissant l’ego de côté, et une capacité à investir dans des potentiels de croissance insuffisamment identifiés par d’autres.
Ses pionniers sont devenus des acteurs majeurs de la finance. Les levées de fonds sont aujourd’hui importantes, les actifs achetés, majeurs. Les « barbares » incarnés par la prise de contrôle sauvage de l’empire agroalimentaire RJR Nabisco par KKR en 1988 se sont normalisés et assagis. Pourtant, dans un environnement de plus en plus compétitif de recherche d’investissements et de dissémination des risques, la capacité de cette industrie à générer les valeurs promises est sans cesse remise en jeu. Récemment, une analyse de Josh Lerner de la Harvard Business School et de Hugh MacArthur de Bain[1], soulignait que si les rachats d’entreprises américaines ont généré des rendements nets moyens de 13,1 % dans les trente dernières années, ces rendements ont tendance à converger avec les rendements boursiers dans les dix dernières années.
Bref, à court terme aux États-Unis, le « premium » apporté par le « private equity » est discuté. C’est que dans le monde de plus en plus standardisé et compétitif du capital investissement, un levier n’a pas été suffisamment exploré : le temps.
Dépasser la durée de 3 à 4 ans
Pour satisfaire leurs propres contraintes de liquidité et de rendement, les opérateurs du « private equity », les fonds de pension, les fonds souverains, les investisseurs institutionnels ont besoin d’un produit « packagé » et normalisé, fondé sur l’effet de levier et le « build-up ». La durée moyenne de détention des entreprises par les fonds est de 3 à 4 ans. Comment dans ces conditions conjuguer les aléas entrepreneuriaux et l’optimisation du développement de l’activité ?
La renonciation des investisseurs à la liquidité, vertu cardinale des marchés, ne s’envisage que pour une période limitée, en contrepartie d’un positionnement plus favorable et si possible relativement assuré sur la courbe rentabilité-risque. Dans un environnement de taux faibles, voire négatifs, dans lequel le recours à la dette n’a jamais été aussi bon marché, le modèle fonctionne malgré le contrepoids d’une inflation du prix des actifs, contrepoids pour l’instant indolore dans la mesure où il joue négativement à l’entrée, mais positivement à la sortie.
Ce modèle est, pour partie aussi, celui d’HLD. Nous n’interdisons pas le recours à la dette – bien que la moitié de son portefeuille n’en porte pas. Et nous savons mettre en œuvre des stratégies de « build-up » quand la conviction est acquise que des acquisitions ciblées permettraient d’accélérer la croissance. En revanche, ce modèle diffère du LBO classique à durée d’investissement limitée qui ne laisse très souvent que trop peu de temps au temps.
En effet, nous avons été créés avec du capital permanent, apporté par des actionnaires – entrepreneurs familiaux ou fonds – avec l’objectif de conjuguer le meilleur des deux mondes : le capital permanent issu de l’actionnariat familial et le savoir-faire du « private equity ».
L’objectif de création de valeur
Le temps nécessaire pour que se concrétise un potentiel de croissance n’est pas normé. Il est variable, parfois aléatoire, mais c’est de lui, beaucoup plus que de l’effet de levier, que viendra la création de valeur. Sur l’ensemble des investissements d’HLD, environ les trois quarts ont des performances standards par rapport à la moyenne des fonds, mais dans un quart des investissements, un travail en profondeur sur une durée longue permet d’égaler des retours exceptionnels. Ce sont ces investissements qui permettent d’atteindre les meilleures performances mondiales, y compris en termes de rentabilité financière.
En effet, être capable de transformer les entreprises est le seul réel levier disponible dans un environnement d’inflation du prix des actifs et de risques systémiques. Et une telle transformation nécessite de disposer de temps. Les fonds traditionnels se situent sur des horizons souvent trop courts, 3 ou 4 ans, qui limitent la possibilité d’accroître la valeur des entreprises avec d’autres moyens que l’endettement. Or, investir avec des capitaux permanents dans des entreprises à fort potentiel de croissance permet de révéler et exprimer ce potentiel sur une longue durée. Bref, si, en finance, la valeur apparaît au croisement du taux de rentabilité interne (TRI) et du temps, beaucoup trop d’investisseurs se limitent au TRI alors que le paramètre temps est porteur de davantage de valeur. HLD a, par exemple, accompagné Filorga pendant neuf années au cours desquelles son chiffre d’affaires est passé de 5 à 250 M€, et où l’entreprise est devenue un leader mondial des produits anti-âge.
52 Entertainment est un autre exemple de parcours exceptionnel, accompagné par HLD depuis 2016. En 5 ans, l’entreprise, présente dans 180 pays, s’est imposée comme le leader mondial du bridge en ligne avec un chiffre d’affaires multiplié par un facteur 10 et ce n’est probablement que le début d’une belle histoire. Dans les deux cas, pouvoir accompagner l’entreprise dans la durée, optimiser son potentiel de création de valeur, est synonyme de performances accrues. Un tel modèle, industriel, se concentre sur les aspects « métier » qui permettent d’améliorer le profil des entreprises, comme les investissements en marketing ou dans des briques technologiques qui permettent une croissance supérieure. Il faut pour cela identifier des entreprises à fort potentiel de croissance, souvent lié au numérique, à la technologie ou à la santé. HLD a ainsi récemment investi dans Photonis, une entreprise française basée en Gironde, numéro un mondial de la photo-détection, connue pour ses innovations dans le secteur de la défense, en particulier pour ses fameuses lunettes à vision nocturne, notamment utilisées par l’armée française. Mais Photonis est aussi une pépite de la « french Tech » dans le domaine civil, grâce au développement d’un ensemble de technologies de détection et d’analyse dans le domaine de la sécurité civile, de la médecine, de la découverte spatiale ou du nucléaire.
Ces entreprises à fort potentiel existent en France et en Europe. Pourtant, notre pays manque de ce tissu de grosses PME et d’ETI, qui constituent les fondamentaux d’économies puissantes, ainsi qu’on l’observe en Allemagne ou dans le nord de l’Italie. La raison ? C’est essentiellement le défaut de capitaux familiaux disponibles pour s’investir dans des développements d’entreprises sur une durée longue, notamment en raison de notre droit des successions. Les entreprises du « private equity » peuvent jouer ce rôle de développement d’un tissu d’entreprises performantes et en croissance forte, en France et en Europe. •
[1] Hugh MacArthur, Josh Lerner and State Street Global Markets & State Street Private Equity Index, “Public vs. Private Equity Returns: Is PE Losing Its Advantage?”, Bain's 2020 Global Private Equity Report, February 24, 2020.
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L’industrie du « private equity » a inventé le métier d’actionnaire et d’investisseur : une capacité singulière à prendre des risques, à analyser les paramètres d’un projet économique sous différents aspects, en laissant l’ego de côté, et une capacité à investir dans des potentiels de croissance insuffisamment identifiés par d’autres.
Ses pionniers sont devenus des acteurs majeurs de la finance. Les levées de fonds sont aujourd’hui importantes, les actifs achetés, majeurs. Les « barbares » incarnés par la prise de contrôle sauvage de l’empire agroalimentaire RJR Nabisco par KKR en 1988 se sont normalisés et assagis. Pourtant, dans un environnement de plus en plus compétitif de recherche d’investissements et de dissémination des risques, la capacité de cette industrie à générer les valeurs promises est sans cesse remise en jeu. Récemment, une analyse de Josh Lerner de la Harvard Business School et de Hugh MacArthur de Bain[1], soulignait que si les rachats d’entreprises américaines ont généré des rendements nets moyens de 13,1 % dans les trente dernières années, ces rendements ont tendance à converger avec les rendements boursiers dans les dix dernières années.
Bref, à court terme aux États-Unis, le « premium » apporté par le « private equity » est discuté. C’est que dans le monde de plus en plus standardisé et compétitif du capital investissement, un levier n’a pas été suffisamment exploré : le temps.
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Pour satisfaire leurs propres contraintes de liquidité et de rendement, les opérateurs du « private equity », les fonds de pension, les fonds souverains, les investisseurs institutionnels ont besoin d’un produit « packagé » et normalisé, fondé sur l’effet de levier et le « build-up ». La durée moyenne de détention des entreprises par les fonds est de 3 à 4 ans. Comment dans ces conditions conjuguer les aléas entrepreneuriaux et l’optimisation du développement de l’activité ?
La renonciation des investisseurs à la liquidité, vertu cardinale des marchés, ne s’envisage que pour une période limitée, en contrepartie d’un positionnement plus favorable et si possible relativement assuré sur la courbe rentabilité-risque. Dans un environnement de taux faibles, voire négatifs, dans lequel le recours à la dette n’a jamais été aussi bon marché, le modèle fonctionne malgré le contrepoids d’une inflation du prix des actifs, contrepoids pour l’instant indolore dans la mesure où il joue négativement à l’entrée, mais positivement à la sortie.
Ce modèle est, pour partie aussi, celui d’HLD. Nous n’interdisons pas le recours à la dette – bien que la moitié de son portefeuille n’en porte pas. Et nous savons mettre en œuvre des stratégies de « build-up » quand la conviction est acquise que des acquisitions ciblées permettraient d’accélérer la croissance. En revanche, ce modèle diffère du LBO classique à durée d’investissement limitée qui ne laisse très souvent que trop peu de temps au temps.
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Ces entreprises à fort potentiel existent en France et en Europe. Pourtant, notre pays manque de ce tissu de grosses PME et d’ETI, qui constituent les fondamentaux d’économies puissantes, ainsi qu’on l’observe en Allemagne ou dans le nord de l’Italie. La raison ? C’est essentiellement le défaut de capitaux familiaux disponibles pour s’investir dans des développements d’entreprises sur une durée longue, notamment en raison de notre droit des successions. Les entreprises du « private equity » peuvent jouer ce rôle de développement d’un tissu d’entreprises performantes et en croissance forte, en France et en Europe. •
[1] Hugh MacArthur, Josh Lerner and State Street Global Markets & State Street Private Equity Index, “Public vs. Private Equity Returns: Is PE Losing Its Advantage?”, Bain's 2020 Global Private Equity Report, February 24, 2020.