Face à la pandémie, l’environnement scolaire actuel ne fait qu’accentuer les inégalités. Seule l’adoption raisonnée, mais rapide et déterminée, des nouvelles technologies de l’éducation – « l’Edtech » – peut inverser la tendance.
Au printemps, plus de 191 pays ont fermé leurs écoles. Plus de 1,7 milliard de jeunes, soit 98% de la population étudiante mondiale, ont étudié de chez eux. La plus grande expérimentation grandeur nature jamais imaginée de produits et services d’éducation en ligne a eu lieu. La crise catalyse l’adoption de nouvelles pratiques pédagogiques, accélérant l’usage des produits et services numériques, faisant tomber barrières psychologiques et tabous. « Durant la pandémie, l’apprentissage à distance a jeté une bouée aux éducations nationales en perdition. Mais les technologies numériques présentent des opportunités qui vont bien au-delà d’un bouche-trou pendant une crise. Elles apportent de nouvelles réponses aux questions fondamentales : qu’apprendre ? comment l’apprendre ? où et quand l’apprendre ? » analyse Andreas Schleicher, directeur du département Education de l’OCDE, dans son rapport The Impact of Covid-19 on Education.
L’usage du numérique éducatif
(« Edtech ») a sans doute gagné cinq à dix ans en six mois. Duolingo, l’une des apps d’apprentissage des langues les plus populaires, a vu doubler le nombre de ses utilisateurs. Celui de nouveaux apprenants sur Coursera a été multiplié par 5 et sur Lalilo, solution francaise d’apprentissage personnalisé de la lecture, par 6. Les investissements dans le secteur ont bondi à 4,5 milliards de dollars au premier semestre, contre 7 milliards pour tout l’an dernier. La Chine, qui fait la course en tête depuis plusieurs en années, a investi à elle seule 2,5 Md$, plus que le reste du monde pris tout ensemble.
Fonctions de base
Dans beaucoup de pays et tout particulièrement en France, l’Edtech n’a été utilisée le plus souvent que pour des fonctions de base : partage d’écran, envoi de documents, messagerie… Les Gafam ont été les grands gagnants du confinement : enseignants et parents ont en place des boucles Whatsapp grâce à Facebook, des classes virtuelles Teams grâce à Microsoft et des cours sur Youtube grâce à Google. Les pratiques innovantes que permettent les technologies n’ont pas été véritablement déployées.
Or, nous n’en sommes qu’au début de la révolution numérique en termes d’innovation pédagogique. Bien conçu, le numérique favorise le travail collectif, réduit les tâches répétitives de correction et d’administration pour les professeurs. Il permet l’accès de tous à des ressources de qualité. En fournissant un apprentissage immersif, motivant et personnalisé, adapté au rythme de chaque enfant, il contribue à lutter contre le décrochage scolaire. En outre, il est infiniment plus rapide et moins coûteux d’utiliser des laboratoires de science virtuels que de construire des laboratoires bien équipés. Et un enseignant peut économiser plusieurs dizaines d’heures d’un labeur fastidieux chaque année grâce à des outils de correction ou de communication avec les parents.
L’Edtech offre l’avantage de la rapidité de déploiement, d’une maitrise des coûts et d’une flexibilité inégalées. Rien de nouveau, mais cette crise aura été la preuve grandeur nature que la technologie ne remplace aucunement le professeur. Au contraire, elle peut lui permettre de se concentrer sur le cœur de sa mission : accompagner les enfants dans leurs apprentissages et leur transmettre les valeurs du vivre ensemble et les références culturelles qui fondent la République.
Qu’il y a loin de la coupe aux lèvres… En France, ce printemps, l’impréparation des enseignants, leur manque de formation, les difficultés de connexion, l’insuffisance d’investissement des systèmes éducatifs dans l’innovation ont généré frustration et déception dans le corps enseignant, chez les parents et chez les élèves.
Plus grave encore, pour beaucoup d’enfants abandonnés à leur sort, les fractures sociales ont été aggravées. L’inégalité dans l’utilisation des outils innovants est abyssale entre les familles et entre les territoires. Or, la crise affecte maintenant tous les modes de production. Si l’éducation figure parmi les secteurs prioritaires d’investissement du plan de relance, c’est que seule une école de qualité, doublée d’une formation tout au long de la vie visant l’excellence, peut permettre de répondre aux défis de transformation de nos sociétés.
Pour construire un système éducatif adapté aux défis du XXIe siècle, il est urgent d’investir dans la formation des professeurs et dans l’innovation pédagogique, en renforçant la filière Edtech. Inutile de répéter les erreurs du passé : les plans d’équipement successifs, politiques plus que réalistes, obsolètes avant d’être exécutés, ont laissé au placard, faute d’usage, des outils chers payés.
Ne succombons pas non plus à la tentation régalienne d’un service public superpuissant et centralisateur. Seuls des partenariats public-privé pour investir dans l’innovation pédagogique peuvent générer une réelle innovation et mettre la technologie au service de l’éducation. Pour que la filière française de l’Edtech progresse, il faut mettre en place trois transformations simples. D’abord, former les enseignants au numérique et leur laisser la liberté de choisir les ressources et outils dont ils ont réellement besoin. Ensuite, s’appuyer sur les territoires en déléguant les budgets nécessaires au plus juste des situations locales. Enfin, faire de l’éducation innovante une priorité du prochain plan d’investissements d’avenir (PIA) pour rattraper notre retard, en favorisant la recherche dans le domaine de l’innovation pédagogique et en soutenant de jeunes sociétés capables de devenir des champions européens.
La transformation de l’école est vitale pour l’avenir de nos enfants, pour le développement de leurs compétences, et pour notre souveraineté culturelle et éducative. Si rien n’est fait, c’est eux qui subiront les conséquences du retard d’investissement que la France et l’Europe laissent se creuser.
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Personne ne sait quelle tournure prendra la pandémie ou si les récentes augmentations de prix seront transitoires, ce qui signifie que les prévisions économiques sont devenues encore plus hasardeuses que jamais. Néanmoins, certaines tendances doivent être surveillées de plus près que d’autres, et certaines politiques doivent être modifiées quoi qu’il arrive.
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Sur plus de 10 000 espèces d’oiseaux, près d’une sur sept est actuellement menacée d’extinction. Le sort des oiseaux, qu’il s’agisse d’individus sauvages ou d’animaux de compagnie, serait plus difficile à ignorer si davantage de personnes comprenaient à quel point ils sont intelligents et complexes.
Historiquement, les succès comme la Conférence de Bretton Woods de 1944 sont beaucoup plus rares que les rassemblements internationaux qui produisent soit de l’inaction, soit des récriminations. La clé est de se concentrer sur ce qui peut être mesuré, plutôt que sur les personnes à blâmer.
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L’ère de la « non-paix »Migrants rassemblés à l'intérieur de la zone tampon de la frontière Turquie-Grèce, à Pazarkule, dans le district d'Edirne, le 20 février 2020.
Les récentes tragédies migratoires dans la Manche et aux frontières occidentales de la Biélorussie montrent à quel point les civils sont devenus des armes involontaires dans une nouvelle ère de conflits perpétuels. Les gouvernements se rendant coupables de mauvais comportements sous couvert d’hypocrisie et de déni plausible, une course « vers le fond » est déjà en cours.
La fin du consensus économiqueLa présidente de la Commission européenne Ursula Von Der Leyen lors de laConférence de presse sur la réponse de l'Union européenne à la crise du coronavirus, à Bruxelles, le15 avril 2020.
Alors que le choc de la pandémie de Covid-19 a initialement suscité l’unité et la convergence en Europe, la phase actuelle de la crise est beaucoup plus délicate sur le plan économique et politique. Si elle est mal gérée, elle peut rouvrir de vieilles blessures et briser la légitimité nouvellement acquise des décideurs politiques.
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Au printemps, plus de 191 pays ont fermé leurs écoles. Plus de 1,7 milliard de jeunes, soit 98% de la population étudiante mondiale, ont étudié de chez eux. La plus grande expérimentation grandeur nature jamais imaginée de produits et services d’éducation en ligne a eu lieu. La crise catalyse l’adoption de nouvelles pratiques pédagogiques, accélérant l’usage des produits et services numériques, faisant tomber barrières psychologiques et tabous. « Durant la pandémie, l’apprentissage à distance a jeté une bouée aux éducations nationales en perdition. Mais les technologies numériques présentent des opportunités qui vont bien au-delà d’un bouche-trou pendant une crise. Elles apportent de nouvelles réponses aux questions fondamentales : qu’apprendre ? comment l’apprendre ? où et quand l’apprendre ? » analyse Andreas Schleicher, directeur du département Education de l’OCDE, dans son rapport The Impact of Covid-19 on Education.
L’usage du numérique éducatif
(« Edtech ») a sans doute gagné cinq à dix ans en six mois. Duolingo, l’une des apps d’apprentissage des langues les plus populaires, a vu doubler le nombre de ses utilisateurs. Celui de nouveaux apprenants sur Coursera a été multiplié par 5 et sur Lalilo, solution francaise d’apprentissage personnalisé de la lecture, par 6. Les investissements dans le secteur ont bondi à 4,5 milliards de dollars au premier semestre, contre 7 milliards pour tout l’an dernier. La Chine, qui fait la course en tête depuis plusieurs en années, a investi à elle seule 2,5 Md$, plus que le reste du monde pris tout ensemble.
Fonctions de base
Dans beaucoup de pays et tout particulièrement en France, l’Edtech n’a été utilisée le plus souvent que pour des fonctions de base : partage d’écran, envoi de documents, messagerie… Les Gafam ont été les grands gagnants du confinement : enseignants et parents ont en place des boucles Whatsapp grâce à Facebook, des classes virtuelles Teams grâce à Microsoft et des cours sur Youtube grâce à Google. Les pratiques innovantes que permettent les technologies n’ont pas été véritablement déployées.
Or, nous n’en sommes qu’au début de la révolution numérique en termes d’innovation pédagogique. Bien conçu, le numérique favorise le travail collectif, réduit les tâches répétitives de correction et d’administration pour les professeurs. Il permet l’accès de tous à des ressources de qualité. En fournissant un apprentissage immersif, motivant et personnalisé, adapté au rythme de chaque enfant, il contribue à lutter contre le décrochage scolaire. En outre, il est infiniment plus rapide et moins coûteux d’utiliser des laboratoires de science virtuels que de construire des laboratoires bien équipés. Et un enseignant peut économiser plusieurs dizaines d’heures d’un labeur fastidieux chaque année grâce à des outils de correction ou de communication avec les parents.
L’Edtech offre l’avantage de la rapidité de déploiement, d’une maitrise des coûts et d’une flexibilité inégalées. Rien de nouveau, mais cette crise aura été la preuve grandeur nature que la technologie ne remplace aucunement le professeur. Au contraire, elle peut lui permettre de se concentrer sur le cœur de sa mission : accompagner les enfants dans leurs apprentissages et leur transmettre les valeurs du vivre ensemble et les références culturelles qui fondent la République.
Qu’il y a loin de la coupe aux lèvres… En France, ce printemps, l’impréparation des enseignants, leur manque de formation, les difficultés de connexion, l’insuffisance d’investissement des systèmes éducatifs dans l’innovation ont généré frustration et déception dans le corps enseignant, chez les parents et chez les élèves.
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Laissés-pour-compte
Plus grave encore, pour beaucoup d’enfants abandonnés à leur sort, les fractures sociales ont été aggravées. L’inégalité dans l’utilisation des outils innovants est abyssale entre les familles et entre les territoires. Or, la crise affecte maintenant tous les modes de production. Si l’éducation figure parmi les secteurs prioritaires d’investissement du plan de relance, c’est que seule une école de qualité, doublée d’une formation tout au long de la vie visant l’excellence, peut permettre de répondre aux défis de transformation de nos sociétés.
Pour construire un système éducatif adapté aux défis du XXIe siècle, il est urgent d’investir dans la formation des professeurs et dans l’innovation pédagogique, en renforçant la filière Edtech. Inutile de répéter les erreurs du passé : les plans d’équipement successifs, politiques plus que réalistes, obsolètes avant d’être exécutés, ont laissé au placard, faute d’usage, des outils chers payés.
Ne succombons pas non plus à la tentation régalienne d’un service public superpuissant et centralisateur. Seuls des partenariats public-privé pour investir dans l’innovation pédagogique peuvent générer une réelle innovation et mettre la technologie au service de l’éducation. Pour que la filière française de l’Edtech progresse, il faut mettre en place trois transformations simples. D’abord, former les enseignants au numérique et leur laisser la liberté de choisir les ressources et outils dont ils ont réellement besoin. Ensuite, s’appuyer sur les territoires en déléguant les budgets nécessaires au plus juste des situations locales. Enfin, faire de l’éducation innovante une priorité du prochain plan d’investissements d’avenir (PIA) pour rattraper notre retard, en favorisant la recherche dans le domaine de l’innovation pédagogique et en soutenant de jeunes sociétés capables de devenir des champions européens.
La transformation de l’école est vitale pour l’avenir de nos enfants, pour le développement de leurs compétences, et pour notre souveraineté culturelle et éducative. Si rien n’est fait, c’est eux qui subiront les conséquences du retard d’investissement que la France et l’Europe laissent se creuser.